Votée par l’Assemblée nationale en janvier 2024, la fameuse loi « anti Airbnb » est passée entre les mains des sénateurs en juin, avec une promulgation prévue pour l’été. Le texte vient bousculer la fiscalité de location saisonnière admise, même s’il s’avère moins sévère que la version adoptée par les députés quelques mois plus tôt. Pour les propriétaires de locations touristiques, le principal changement concerne le taux d’abattement applicable au régime d’imposition micro-BIC, qui sera aligné sur la location de longue durée – sauf exceptions. Mais il y a également tout un volet réglementaire à prendre en compte. Explications.
Quel est l’objectif de la loi « anti Airbnb » ?
La loi Le Meur, symboliquement surnommée loi « anti Airbnb » parce qu’elle vise à remettre en cause la prédominance d’un marché locatif qui trouve son incarnation dans la célèbre plateforme saisonnière américaine, s’attaque essentiellement à la fiscalité de la location touristique.
Le texte répond à deux volontés :
- Rétablir l’équilibre entre la fiscalité de la location meublée touristique et celle de la location classique de longue durée.
- Inciter les propriétaires à revenir sur le marché de la location traditionnelle, afin de pallier le manque de logements et de remédier au déséquilibre du marché locatif privé, dans les zones dites « tendues ».
La suppression de la niche fiscale Airbnb : une mesure phare de la proposition de loi
La mesure phare de la loi « anti Airbnb » touche à la fiscalité de la location saisonnière. Elle ambitionne de supprimer la niche fiscale accordée aux propriétaires qui louent leur logement comme meublé de tourisme : une exonération d’impôt dont ne bénéficient pas les bailleurs de longue durée.
Initialement, les locations meublées bénéficient d’un abattement au régime micro-BIC, variable en fonction du type de meublé :
- Abattement forfaitaire de 71 % appliqué aux revenus locatifs pour les meublés touristiques classés, dans la limite de 188 700 € de recettes annuelles.
- Abattement forfaitaire de 50 % appliqué aux revenus locatifs pour les meublés classiques, dans la limite de 77 700 € de recettes annuelles.
(Source : impots.gouv.fr)
En comparaison, l’abattement s’élève à 30 % pour les locations nues de longue durée. Cela n’est toutefois valable qu’au régime micro : au régime réel, les abattements sont remplacés par la déduction au réel des charges induites par la détention et la gestion du bien immobilier.
De façon à résorber cet écart, la loi « anti Airbnb » prévoit d’aligner la fiscalité des deux formes locatives :
- Abattement ramené à 50 % pour les meublés classés situés dans les zones tendues (au lieu des 30 % initialement prévus : les sénateurs ont choisi de maintenir un avantage notable en raison de la qualité de ces locations, et afin de conserver le principe d’incitation au classement des logements).
- Abattement ramené à 30 % pour les meublés classiques situés dans les zones tendues.
- Abattement ramené à 41 % pour les meublés classiques situés dans les zones rurales et dans les stations de ski, dans la limite de 50 000 € de recettes annuelles.
La loi « anti Airbnb » prévoit donc deux exceptions à l’alignement de la fiscalité de la location saisonnière : les meublés classés et les meublés installés en zone rurale ou dans une station de ski.
De nouveaux outils pour les communes face à l’expansion des meublés de tourisme
Le texte ne s’intéresse pas qu’à la fiscalité. Il prévoit également de renforcer la réglementation en matière de location saisonnière, sur trois plans :
- L’obligation faite aux propriétaires d’enregistrer leur bien avant le 1er janvier 2026 par le biais d’un téléservice s’ils veulent le proposer en location touristique. Cela donnera aux communes les moyens pour mieux contrôler ces locations, en leur permettant de disposer d’informations fiables.
- Le doublement de l’amende civile imposée aux propriétaires qui transforment illégalement leur logement en meublé de tourisme (sans déclaration et/ou sans autorisation préalable, en fonction des villes). L’amende passe de 50 000 à 100 000 €, et s’applique aussi aux intermédiaires de location, comme les conciergeries.
- L’obligation de réaliser un DPE pour les locations touristiques à compter du 1er janvier 2034, avec un seuil fixé à une note « D » pour qu’un logement soit autorisé à la location. Là encore, le texte a été adouci depuis son passage entre les mains des députés, puisque ceux-ci avaient fixé une échéance initiale pour 2029).
Enfin, il faut noter que le Sénat a supprimé la possibilité donnée aux élus locaux de réduire la durée maximale annuelle de location d’une résidence principale à 90 jours, au lieu de 120 jours actuellement. Cette proposition n’est donc plus dans le texte retouché par les sénateurs.
Mais attention : la loi « anti Airbnb » n’a pas encore été adoptée officiellement. Elle doit d’abord passer par une commission mixte paritaire. Bien qu’improbables à ce stade, des changements pourraient encore être apportés.
Que devez-vous retenir de la loi « anti Airbnb » ?
En tant que professionnel·le de l’immobilier, vous devez avoir connaissance des nouvelles règles en matière de fiscalité de location saisonnière et de renforcement de la réglementation applicable aux propriétaires comme aux logements. Vous devez également être en mesure d’expliquer la raison d’être de ce texte à vos clients bailleurs : celui-ci répond à une nécessité, eu égard à l’explosion du parc locatif touristique ces dernières années qui contribue à la hausse des prix et à la raréfaction des biens en location de longue durée.
Une réelle expertise en matière de location saisonnière est indispensable si vous pratiquez la gestion locative ou si vous envisagez de vous lancer dans ce secteur particulièrement rentable pour les professionnels. En effet, on estime qu’un tiers seulement du parc locatif est géré par les agences et les mandataires… Ce qui offre de nombreuses opportunités !
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